Vous avez envie de réussir une fournée de pain au levain parfaite ? Moi aussi, et ça ne date pas d’aujourd’hui !!
Il y a 30 ans que j’essaie de m’améliorer pour y parvenir.
Au passage, écrire ce blog m’a permis de beaucoup progresser et je sens que je ne suis pas loin de l’objectif.
Mais la dernière fois que j’ai mis mon tablier de boulanger du dimanche, j’ai été un peu léger sur le respect des délais : la pâte a très bien levé, mais trop longtemps, et du coup est retombée avant que je n’enfourne.
En plus, par étourderie, je l’ai fait cuire dix minutes de trop.
Le résultat n’était pas tout à fait raté, mais moins souple et aéré qu’à l’habitude. Je m’en suis voulu.
Aussi, j’ai décidé cette fois de me rattraper et de m’appliquer pour faire de mon mieux.
Cela m’a donné l’occasion de réfléchir à tous les points importants qui, à mon avis, conditionnent la réussite d’une fournée de pain au levain parfaite.
J’en ai dressé une liste en dix points que je partage avec vous. Je m’aperçois en l’écrivant que c’est la liste des dix commandements qu’il m’a fallu comprendre au fil des années pour passer de l’irrégularité chaotique à la régularité délicieuse. En trois mots, cela peut se résumer à : bien choisir, mesurer, respecter.
(1) BIEN CHOISIR UNE MÉTHODE EFFICACE ET PRÉCISE
Vous devez bien entendu avant de vous élancer dans les airs avoir le plan de vol d’une méthode cohérente et précise. Je veux dire par là décrite avec précision, point par point.
Si vous lisez régulièrement le blog, vous connaissez la mienne : préparation du levain en 4 étapes pendant deux jours, puis préparation d’une pâte assez liquide, levée pendant quatre à cinq heures, mise en moules deux heures avant l’enfournement, une heure de cuisson.
Pour ceux qui veulent découvrir plus en détail la méthode « Le Pain Facile », vous pouvez lire pour commencer ces articles : Le levain facile, La fournée, Calculez votre poids de pâte.
Il y a d’autres techniques à explorer. En particulier si vous voulez faire du pain non moulé. Dans ce cas, les contraintes sont différentes.
Vous pouvez lire des livres ou fouiner sur internet, par exemple visiter le blog «La boite à pain» ou «Du pain sur la planche» ou regarder les vidéos de Yannick Lescure sur YouTube.
Les choix sont bien définis et la méthode assimilée, passons maintenant aux préparatifs préalables à la fournée…
(2) PRÉPARER UN BEAU LEVAIN BIEN ACTIF
Préparer un levain en pleine forme est un préalable indispensable. Le levain est le moteur de votre fournée. Il doit en quelques heures transmettre sa vigueur à toute la pâte pour lui permettre de fermenter au mieux.
Et pour cela, il doit être puissant, rempli d’énergie vitale.
Un boulanger professionnel va réutiliser son levain tous les jours ou tous les deux jours, il peut ainsi faire évoluer son élevage de bactéries et de levures sans interruption pendant des années vers la perfection. Pour un boulanger amateur, qui va faire son pain toutes les deux ou trois semaines, voire plus, il y a là un problème : une cassure longue pendant laquelle son levain va s’endormir au frigo, jusqu’à risquer de s’éteindre.
Vous devez donc avoir une stratégie pour le maintenir ou le réanimer au moment voulu. Elle peut être plus ou moins simple et plus ou moins contraignante.
Avec ma recherche du « Pain Facile », j’ai adopté pour une méthode simple et très peu contraignante tout en obtenant un levain super actif.
Vous pouvez la découvrir ici si ce n’est pas déjà fait.
(3) BIEN CHOISIR LA FARINE
S’il ne devait y avoir qu’un point à cette liste, ce serait celui-ci : choisissez une farine panifiable de haute qualité !!
C’est indispensable à la réussite de votre fournée. J’ai raté pas mal de pains à mes débuts pour avoir ignoré ce point.
Celle que j’utilise depuis une quinzaine d’années est une farine bio (biodynamique en réalité), semi-complète (type 80-110), issue de variétés anciennes de blé, moulue à la meule de pierre, que j’achète directement chez un paysan de ma région (Bourgogne).
Nouveauté depuis cette année : je mélange 25 % de farine de petit épeautre à ma farine de blé (pour le pain, pas pour le levain). J’en suis satisfait.
Prospectez autour de chez vous, faites vos essais jusqu’à trouver la meilleure matière première pour votre pain !!
Il y a beaucoup de paysans bio qui produisent des farines de qualité aujourd’hui en France.
Pour avoir des détails à ce sujet, voyez mon article : Comment choisir votre farine ?
(4) RESPECTER LES PROPORTIONS D’INGRÉDIENTS
La recette que vous utilisez doit décrire avec précision les quantités d’ingrédients.
Au fil du temps, je suis passé de mélanges « au jugé » à traiter la boulangerie comme de la pâtisserie et peser chaque ingrédient.
À partir de T = 4h, je surveille la levée dans les moules. L’enfournement doit avoir lieu entre 4h et 6h après le mélange initial. C’est selon la rapidité de la levée, mais pour moi, c’est la plupart du temps aux alentours de 5h. Le but est de laisser lever suffisamment longtemps mais surtout pas trop pour que la pâte soit toujours en pleine poussée à l’enfournement et qu’elle n’ait pas commencé à redescendre.
La principale proportion, celle qui conditionne la souplesse et la légèreté de la pâte, c’est le rapport entre l’eau et la farine.
Cela varie selon la méthode que vous appliquez, mais je crois qu’il est important d’être précis en ce domaine.
À mes débuts, j’utilisais environ 2 kg de farine par litre d’eau (nombre que j’avais trouvé dans un livre).
Petit à petit au fil des années, j’ai diminué la proportion de farine pour alléger toujours plus la pâte. Maintenant, je l’ai stabilisée à 1110 g de farine par litre d’eau (10/19 de farine et 9/19 d’eau).
Il y a aussi la proportion de levain par rapport au poids total de pâte total. Dans la recette « pain facile », c’est 1/3. Mais pour d’autres recettes, 1/4 ou parfois moins.
En tout cas, peser les 4 ingrédients (farine, eau, sel, graines) et respecter avec précision mes proportions a amélioré d’un coup la qualité de mes fournées et je ne regrette pas les temps laxistes où je mesurais littéralement « à la louche ».
Voyez l’article : Calculez vos ingrédients pour le pain » pour en savoir plus. Vous pourrez y télécharger ma fiche PDF gratuite pour être guidés dans vos propres calculs.
(5) MESURER LA TEMPÉRATURE
Un pain au levain, c’est un élevage de bactéries et de levures qui font fermenter notre pâte et ce faisant la prédigèrent pour nous.
Ces bactéries se sentent à l’aise pour fermenter et se reproduire entre 25 et 30 °C, ce qui est loin de la température de ma cuisine en ce moment.
Avec les froids de ce mois de décembre, elle se trouve plutôt à 19°. Elle n’est donc pas le lieu idéal pour y faire lever de la pâte à pain.
Pour améliorer cela, j’utilise trois outils :
- 1— Tiédir l’eau de coulage permet d’obtenir une pâte à bonne température (entre 25 et 30 °C). On trouve sur internet des formules comme : « température de la pièce + température de la farine + température de l’eau = 70 °C ».
Pour simplifier, j’ai adopté été comme hiver une température de 40 °C pour l’eau de coulage. J’ai constaté que cela me permet d’obtenir une pâte autour de 26 °C à la fin du pétrissage. - 2— Couvrir la bassine d’une quantité plus ou moins importante de linges (j’utilise d’anciennes serviettes de toilette recyclées en auxiliaires de boulangerie). Cela permet de maintenir la chaleur de la pâte à l’intérieur de la bassine, en plus d’éviter les courants d’air que nos alliés microscopiques n’aiment pas.
- 3— Faire lever la pâte près du poêle en hiver, tout en faisant attention à ce que la température reste raisonnable (pas plus de 27 °C). J’essaie de faire une installation qui permette de la maintenir proche de 25°. Et cette fois, à l’aide de serviettes et couvertures, et outillé d’un thermomètre de pâte et d’un thermomètre ambiant, j’ai réussi à tenir l’objectif avec précision. Si bien que je n’avais pas anticipé la levée formidable que cela a provoqué !!
(6) RESPECTER LES DÉLAIS
Le temps, pour un processus vivant comme la fabrication de pain au levain, est un paramètre primordial.
Faire lever ou cuire un peu trop longtemps ou pas assez peut tout changer au résultat de la fournée.
Vous devez donc adopter une méthode qui décrive avec assez de précision les différents temps à respecter.
Décrire avec précision ma gestion du temps depuis la sortie du levain du frigo trois jours avant la fournée, jusqu’au défournement des pains, et même jusqu’à la mise au congélateur le soir de la fournée est le projet d’un de mes futurs articles.
Avec à la clé un nouveau PDF qui rassemblera tout cela et que vous pourrez télécharger gratuitement sur le blog.
À venir très prochainement.
En attendant, vous pouvez télécharger gratuitement les deux premiers PDF de la série : CALCULEZ LE POIDS DE PÂTE ET DE LEVAIN POUR VOTRE FOURNÉE et CALCULEZ LE POIDS DES INGRÉDIENTS POUR VOTRE FOURNÉE → ICI !!
(7) ENFOURNER À FOUR BIEN CHAUD
Le principe est simple : enfourner une pâte en pleine poussée dans un four bien préchauffé.
Cela lui fera subir un choc thermique qui produira deux effets :
- Faire gonfler sous l’action de la chaleur les milliers de bulles d’air enfermées dans la pâte, et de ce fait faire gonfler et aérer les pains.
- Provoquer un croûtage extérieur de la pâte qui va bloquer et stabiliser les pains et éviter qu’ils ne retombent comme un soufflé.
Plus votre four dispose d’une forte inertie thermique, moins il se refroidira à l’enfournement, et meilleure sera la cuisson.
D’où les lourds fours en pierre de nos ancêtres qui pouvaient rester chauds plusieurs jours durant et cuire plusieurs fournées d’affilée.
(8) RESPECTER LE FONCTIONNEMENT DE VOTRE FOUR
Chaque four a ses caractéristiques propres qu’il est important de connaître et de respecter pour cuire au mieux votre fournée. Il est impossible de donner des consignes générales, c’est à chacun d’expérimenter avec son matériel.
Par exemple, dans ma cuisinière Godin à gaz, que j’utilise la plupart du temps pour la cuisson du pain, je procède comme ceci :
- Préchauffage à thermostat 8 pendant au moins 20 minutes. Si je prépare en même temps des pizzas, je les fais cuire en premier, ce qui améliore le préchauffage.
- Enfournement de mes 5 pains, et au bout de 5 minutes, je baisse le four à thermostat 7, sans l’ouvrir « pour voir » (risque de faire retomber les pains en plein gonflement).
- Au bout de 25 minutes, je fais faire aux pains un demi-tour sur eux-mêmes et je les change de place : ceux du centre passent sur les côtés et vice versa. Cela me permet d’homogénéiser la cuisson. Sinon, ceux du centre seront brûlés en dessous avant que ceux des côtés ne soient cuits. Je baisse le four à thermostat 6.
- Je laisse encore cuire 35 minutes (soit une heure au total), puis je défourne et démoule mes pains.
J’ai mis en place cette procédure au fil du temps, par essais et erreurs, apprenant à connaître de mieux en mieux mon outil.
Dans le four en pierre de mon poêle de masse, c’est plus long, mais beaucoup plus simple :
- Feu dans le four pendant environ 2 h jusqu’à ce que le thermomètre intégré affiche 250 °C.
- Je fais alors tomber les braises dans le foyer du poêle et j’attends au moins une demi-heure pour que la chaleur se répartisse bien homogène dans le four.
- J’enfourne mes 5 à 7 pains (il y a plus de place et grâce à l’inertie, la quantité ne pose pas de problème).
- Je ne touche plus à rien, et au bout d’une heure, je défourne et démoule.
Vous allez me dire : « Il est génial ce four, pourquoi ne pas l’utiliser à chaque fois ? ». En réalité, il nécessite de faire un gros feu, donc je ne peux m’en servir que s’il fait froid dehors, sinon la maison devient vite une étuve…
(9) RESPECTER UN REFROIDISSEMENT CONTRÔLÉ
Quand il sort du four, le pain n’est pas tout à fait fini de cuire. Il va finir sa cuisson grâce à sa température interne, tout en passant de 200 °C à 20 °C. Il vaut mieux que cela se fasse doucement.
Il va aussi évacuer de l’humidité sous forme de vapeur d’eau. Cette humidité ne doit pas être bloquée ni se condenser dans le pain au risque de le ramollir et de lui faire perdre son croustillant.
Pour cela :
- 1— Je le démoule immédiatement après le défournage.
- 2— Je dépose les pains les uns contre les autres sur des cartons à œufs.
- 3— Je les recouvre de 3 ou 4 épaisseurs de mes serviettes spéciales pain.
- 4— Ayant cuit la fournée en début d’après-midi, je n’y touche plus jusqu’au soir.
À ce moment-là, les pains sont tièdes et prêts pour la dernière étape : le stockage et la dégustation !!
(10) RESPECTER UN BON PROCESSUS DE STOCKAGE POUR SE RÉGALER LONGTEMPS
Bientôt le meilleur moment de la journée : la dégustation d’une tranche tiède et croustillante accompagnée de… ce qui vous fait envie.
Ce n’est pas le moment où votre pain sera le plus digeste (il faudra pour cela qu’il rassisse une nuit), mais bon sang comme c’est là qu’il est le meilleur !!
Excès de gourmandise assuré…
Avant cela, terminons la fournée. Je choisis le pain que je vais garder pour manger en premier, et ceux que je vais conserver.
Dans une fournée, il y a toujours un pain qui est un peu plus grillé sur le dessous que les autres. C’est celui-là que je choisis pour manger de suite.
Pour la conservation, j’ai choisi la congélation qui est facile et permet d’avoir, quand il vient de décongeler, un pain presque frais.
Si vous avez l’image d’une baguette toute flasque qui sort du congélateur, oubliez !!
Le pain au levain résiste beaucoup mieux au cycle congélation-décongélation.
Je coupe mes quatre pains par le milieu, ce qui me permet ensuite de les sortir en petites quantités au fûr et à mesure des besoins, et de manger en permanence du pain relativement frais bien que je ne cuise une fournée que toutes les deux ou trois semaines.
Je les enferme dans des sacs en plastique et les dépose dans un bac du congélateur.
Il faut un peu anticiper : la décongélation douce à température ambiante prend au moins trois heures.
Sinon, il faut forcer en chauffant au four, mais je préfère la méthode douce.
Et maintenant, le moment est enfin venu de se régaler !!
(11) BILAN DE CETTE « FOURNÉE PARFAITE »
Alors, ayant appliqué tous ces principes, ai-je atteint la fournée parfaite ? Eh bien non, pas tout à fait cette fois encore…
Comment, mais alors les principes énoncés ci-dessus sont bidons ? Non pas du tout, ils sont le chemin de la réussite, dont j’ai compris l’importance au fil des années.
Mais alors que s’est-il passé ? Imaginez une machine très sensible qui comporte dix boutons de réglage : dès que vous modifiez un bouton dans la bonne direction, cela interagit avec les autres.
Et du coup, un petit ajustement sur un autre bouton s’avère nécessaire la fois suivante.
Disons avant tout que cette fournée est délicieuse et réussie. Ce n’est pas du tout un échec.
En fait, bien que j’aie respecté mes temps habituels, la levée a été un peu trop longue.
Je m’explique : c’est la première fois que je respecte avec autant de précision le bouton 5 : maintenir en permanence une température de la pâte proche de 25 °C.
Du coup : levée extraordinaire, plus puissante que d’habitude. Et le bouton 6 : respect des délais s’est trouvé réglé un peu fort.
Habituellement, 5 heures de levée conviennent très bien. Mais pour cette fois, quatre heures trente, voire peut-être quatre heures auraient suffi. Deux problèmes :
- La pâte était au maximum de sa poussée et il vaut mieux enfourner un peu avant ce maximum, car alors elle a vite fait de retomber.
- Et en plus les moule étaient pleins à ras bord.
J’aurais pu m’en apercevoir, mais avec mon installation de serviettes et couvertures, je n’y avais pas accès visuellement.
Je ne m’en suis rendu compte que quand j’ai soulevé les linges au moment d’enfourner…
Résultat : en début de cuisson, deux pains ont débordé de leur moule.
Accident très pénible, avec des morceaux de pâte qui brûlent et charbonnent sur la sole du four. À éviter.
En plus, en voulant gratter immédiatement les morceaux de charbon sur la sole du four pour éviter que toute la maison sente le brûlé, j’ai malencontreusement choqué un moule. Et j’ai vu sous mes yeux le pain dégonfler d’un coup comme un soufflé qui retombe.
Donc : les quatre autres pains sont parfaits, mais avec ce cinquième un peu tassé et l’accident du débordement, on ne peut pas dire que c’est la fournée parfaite…
Vais-je me décourager pour autant ? Bien sûr que non, l’important, c’est d’apprendre de mes erreurs et de progresser à chaque itération…
Du coup, un peu comme d’habitude d’ailleurs, la fournée parfaite, c’est pour la prochaine fois !!
Et là, m’étant astreint pour toi, cher lecteur, à écrire cette liste des dix points à surveiller, je sens que je m’en suis approché d’un coup !!
Le prochain coup, ça va être génial !!
Rendez-vous à la prochaine fournée…
À bientôt les Amis !!